Le rétrofit de véhicules est présenté comme la solution de transition en termes énergétique, écologique et économique. Un arrêté autorise le rétrofit de moteurs thermiques vers des moteurs électriques. Mais qu’en est-il de son réel intérêt pour les entreprises ?
Qu’est-ce que le “rétrofit” ?
L’étude “Rétrofit” de l’ADEME de mars 2021 définit le rétrofit (“réaménagement”, plus couramment traduit par “conversion”) comme une pratique qui permet de rénover les véhicules : ajout, modification ou restauration de systèmes vieillissants tout en maintenant l’usage initial du système.
Le retrofit évite souvent l’achat d’un véhicule neuf par le remplacement de la partie moteur. En France, l’arrêté du 13 mars 2020 autorise cette pratique de façon très encadrée. Il est relatif aux conditions de transformation des véhicules à motorisation thermique en motorisation électrique à batterie ou à pile à combustible.
Une entreprise peut donc être homologuée pour remplacer un type de moteur par un moteur électrique défini pour un modèle de véhicule défini. Les possibilités de rétrofit restent donc très limitées.
Pour les avantages énergétiques et écologiques, nous vous laissons vous reporter à l’étude ADEME (lien en fin d’article). Nous allons toutefois explorer l’utilisabilité et la rentabilité pour une entreprise de rétrofiter un véhicule.
Pourquoi rétrofiter un véhicule ?
Coût du moteur par rapport au coût du véhicule
Quels sont les éléments coûteux d’un véhicule ? L’ensemble moteur et réservoir (ou batteries) peut représenter une grande part du prix du véhicule. Toutefois, pour des véhicules spécifiques, l’aménagement ou les pièces spéciales voire rares pondèrent ce coût.
Le retrofit peut donc être une solution si la spécificité du véhicule le rend peu disponible ou coûteuse à mettre en place sur un autre véhicule.
Réponse à une obligation règlementaire
Des obligations règlementaires peuvent être imposer à une entreprise par pleins d’acteurs :
- Puissance publique : que ce soit la règlementation européenne ou française …
- Collectivité / Métropole : ZFE, plans mobilités, …
- Donneurs d’ordre : objectifs RSE des grands groupes, politique interne d’entreprises …
Si le véhicule ne respecte pas le seuil d’émissions, le rétrofit est une solution économique à envisager.
Pourquoi ne pas rétrofiter un véhicule ?
Retrofit et entretien du véhicule
Le rétrofit pose la question de l’entretien du véhicule et de sa réparation. En effet, l’entretien d’un véhicule comprends le moteur et d’autres éléments mécaniques :
- L’entreprise qui réalise le rétrofit a-t-elle les capacités à entretenir le véhicule ? Elle en a sûrement les compétences côté moteur, mais qu’en est-il sur les autres éléments ? A-t-elle la disponibilité et les équipes prévues pour le faire ? Y’a-t-il un réseau, un maillage d’acteurs suffisant pour l’entretien sur le territoire de l’entreprise ?
- L’entretien du véhicule demande-t-il une habilitation ou une certification particulière ? Nous voyons que ceci est une problématique aujourd’hui autour des véhicules GNV.
- Le rétrofit est autorisé que pour les véhicules de plus de 5 ans. Ceci simplifie la gestion de la garantie. Toutefois, si le véhicule comprends des éléments qui ne peuvent être entretenus que par une société spécialisée ou le constructeur, est-ce qu’elle voudra toujours le faire après rétrofit ?
Retrofit et durée de vie total du véhicule
Le rétrofit est souvent décrit comme une nouvelle jeunesse pour le véhicule. Le moteur est en effet lui à zéro kilomètres. Toutefois, il n’en est rien des autres éléments du véhicules.
- Est-ce que le rétrofit prolonge la durée de vie du véhicule ? Le moteur n’est pas nécessairement l’élément le plus fragile du véhicule. Le châssis, par exemple, est souvent un élément décisif dans la durée de vie total du véhicule.
Seulement pour l’électrique ?
Comme nous le disions en introduction, le rétrofit vers d’autres moteurs que les systèmes électriques n’est pas autorisé. Des entreprises développent toutefois des solution de rétrofit de moteurs thermiques diesel vers des moteurs GNV ou hydrogène.
Pour le GNV, l’entreprise Faral développe d’ores et déjà un kit permettant une bicarburation GNC – diesel. Cette solution vient ainsi s’ajouter au moteur existant et est réversible. Elle ne permet pas le gain que permettrait un rétrofit. C’est pourquoi l’entreprise développe en parallèle sa solution de rétrofit complet. Elle n’attend plus que l’homologation soit possible.
Côté moteur hydrogène, Efficient Hydrogen Motors s’est lancé dans l’aventure : à retrouver bientôt parmi les projets candidats Mobilité décarbonée de Crisalide Eco-activités
Jérémy Cantin, PDG d’e-Néo, et Tariel Chamerois, Directeur RSE et Livraison urbaine chez DB Schenker nous avais consacré un temps pour échanger sur la technologie du retrofit H2 (vidéo en fin d’article)
Quels scénarios semblent les plus probables ?
Retrofit des voitures de collections
Le rétrofit a un coût : 15000 à 25000 euros pour une voiture (estimations ADEME cf. Etude). Le véhicule doit donc avoir une forte valeur ajoutée en lui même pour compenser ce coût. Les voitures de collections vouées à rouler sont exactement dans ce modèle. On peut supposer qu’un collectionneur aimant rouler avec sa voiture préférera un rétrofit que la laisser au garage car trop polluante ou trop coûteuse en énergie.
Toutefois, ceci pose la question de la classification de “voiture de collection”. Ainsi une des conditions que met en avant Mini est de pouvoir revenir à l’état d’origine. Donc ce rétrofit demande une préservation et une conservation des pièces enlevées au véhicule (et donc un coût supplémentaire).
Retrofit des utilitaires professionnels et camions spécifiques
De la même manière, les véhicules aménagés ou spécifiques sont un segment de marché intéressant. L’aménagement ou les équipements spécifiques qui sont ajoutés au véhicule portent l’essentiel de sa valeur. Ceci peut prendre la forme de simple ajout comme de modifications plus profondes du véhicules.
Nous pouvons ainsi penser aux véhicules adaptés aux personnes handicapées, aux utilitaires d’artisans, aux véhicules de transports de marchandises spéciales ou encore à certains engins de chantier.
Le rétrofit ne sera certainement pas la révolution avancée par les fournisseurs de solutions. Toutefois, le rétrofit est une solution à étudier dans le cadre de la transition énergétique des mobilités d’une entreprise.
Liens
- Etude “Retrofit” ADEME – infographie pédagogique sur le process de rétrofit : https://librairie.ademe.fr/mobilite-et-transport/4590-etude-retrofit.html
- Article Mini : Mini propose aux propriétaires de ses modèles historiques de les convertir à l’électrique
- Article retrofit GNV : Rétrofit : du diesel au GNV, la nouvelle vie de Faral