
Mixenn : Quels sont les grands chiffres et les principales tendances 2025 du GNV en Bretagne, aussi bien pour le transport de marchandises que pour celui de voyageurs?
Nicolas Allain : Aujourd’hui, la Bretagne compte près de 1 300 véhicules BioGNV/GNV immatriculés, majoritairement des poids lourds (autobus, autocars, porteurs et tracteurs). Pour soutenir cette dynamique, 25 stations publiques et 15 stations privées sont réparties sur les quatre départements, assurant l’avitaillement des flottes.
De plus, la consommation de gaz dédiée à la mobilité a été multipliée par 2,7 en cinq ans, confirmant le BioGNV/GNV comme une alternative crédible au diesel.
Autre tendance forte importante : le verdissement des usages, puisque plus de la moitié des volumes consommés proviennent désormais du BioGNV.
Mixenn : Quels sont pour vous les faits marquants de cette année 2025 ?
N.A. : Les différents faits marquants sont les suivants :
- Retour à la compétitivité économique : le prix du GNV retrouve un équilibre avec celui du gazole. Pour renforcer la visibilité des transporteurs, certains exploitants proposent désormais des contrats à prix fixe sur tout ou partie des volumes, pour des durées allant de 1 à 4 ans.
Les perspectives à moyen terme laissent entrevoir une stabilisation, voire une baisse des prix du BioGNV/GNV.
Nicolas Allain, chargé du développement de la mobilité BioGNV chez GRDF
- Évolution des motorisations : les gammes IVECO et SCANIA accélèrent leur commercialisation avec des véhicules plus puissants, plus coupleux et jusqu’à 10 % plus économes en carburant. Lors du salon Solutrans, Volvo a annoncé son intention de proposer, dès 2027, une gamme de véhicules fonctionnant au GNC, enrichissant ainsi l’offre disponible.
Malgré ces avancées en faveur de la baisse des émissions de CO2, il reste essentiel d’éviter le retour massif au diesel, qui irait à contre-courant des objectifs de la décarbonation.
Mixenn : En quoi la réglementation repoussée et les clauses de revoyure freinent-elles les décisions d’investissement ?
N.A. : Les réglementations (ZFE, CO2, IRRIC, PPE 3, menaces sur le PLF 2026 du B100 etc.) repoussées et/ou annulées dans un contexte économique tendu, freinent les décisions d’investissement des transporteurs en faveur de la décarbonation des mobilités.
L’absence de réglementation précise peut créer des incertitudes quant aux obligations et aux avantages des investissements, ce qui peut dissuader les transporteurs et collectivités de s’engager en faveur des initiatives de décarbonation.
Nicolas Allain, chargé du développement de la mobilité BioGNV chez GRDF
Mixenn : Malgré ce contexte, quels nouveaux projets marquent la fin d’année 2025 ?
N.A : Plusieurs projets significatifs ont marqué cette fin d’année, avec l’ouverture ou la remise en service de nouvelles stations GNV/BioGNV, publiques et privées.
Stations publiques
- Lannion : la station opérée par BMGNV, inaugurée en octobre, alimente désormais les transporteurs, les collectivités et Transdev.
- Moréac : la station a rouvert sous l’exploitation d’Eonnet Énergies Vertes, renforçant l’offre sur cet axe.


Stations privées
- Pontivy et Saint-Brieuc : deux nouvelles stations Transdev permettent aux autocars du réseau BreizhGo de rouler au bioGNV, conformément à l’engagement de la Région Bretagne en faveur de la décarbonation des transports de voyageurs d’ici 2030.
- Les prochains appels d’offres porteront sur le Finistère et l’Ille-et-Vilaine, avec une part importante du parc attendue au bioGNV.

Les agglomérations de Rennes, Brest, Saint-Brieuc, Saint-Malo, Quimper et Lorient poursuivent le remplacement progressif des véhicules diesel par des motorisations plus propres, notamment au BioGNV.
Mixenn : Dans ce contexte contrasté, pourquoi le GNV reste-t-il une solution pertinente en Bretagne, notamment pour le transport de voyageurs ?
N.A. : Tout d’abord, le GNV constitue un atout environnemental majeur : il émet jusqu’à 95 % de particules fines en moins et réduit significativement les émissions de NOx par rapport au diesel. Ces bénéfices sont essentiels pour améliorer la qualité de l’air dans les zones urbaines et touristiques bretonnes. Avec le bioGNV, produit à partir de déchets agricoles et organiques, le bilan carbone peut être réduit de 80 à 90 %, ce qui s’inscrit pleinement dans la stratégie régionale de décarbonation.
C’est également une ressource locale et circulaire : la Bretagne dispose d’un fort potentiel de méthanisation agricole (élevage, agroalimentaire), permettant de produire du bioGNV localement. Cette dynamique favorise l’autonomie énergétique et la création de valeur dans les territoires.
Cette énergie est par ailleurs adaptée au transport de voyageurs et de marchandises. Les véhicules au GNV offrent une autonomie suffisante pour les lignes régionales et sont moins bruyants que les véhicules diesel, ce qui améliore le confort des voyageurs, des riverains et des conducteurs.
Le GNV présente aussi un coût maîtrisé et stable, avec une volatilité tarifaire bien moindre que celle du diesel. Un atout essentiel pour les opérateurs de transport publics et privés soumis à des contraintes budgétaires.
Enfin, la Bretagne bénéficie d’un maillage de stations en plein développement, facilitant l’approvisionnement des flottes de transport et renforçant l’attractivité de cette énergie.
Dans un contexte marqué par des incertitudes réglementaires, économiques et technologiques, la clé réside dans un mix énergétique plutôt qu’une solution unique. Le bioGNV se distingue comme une solution crédible, mature, fiable et disponible dès aujourd’hui.